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Gilles en visite au Foyer Pierre du Pauvre de Kara, Togo

Venir à Kara, c'est un besoin de l'association "Le Chêne de Mambré" qui soutient depuis maintenant 40 ans, le Foyer Pierre du Pauvre de Kara. C'est aussi un besoin pour les cadres de ce foyer togolais, d'être visités et ainsi confirmés dans leur travail. Ce foyer héberge des enfants pauvres ou orphelins de la région de Kara, au Togo.

Dimanche 21

Publié le 23 Janvier 2024 par GillesLORTEAU

Le matin, je suis souvent réveillé vers 5h30.
Les coqs commencent à chanter, il peut y avoir quelques mouvements parmi les jeunes du Foyer.
J'en profite pour écrire dans le Blog.
Il fait frais (tout est relatif par rapport à la France actuellement, mais ici, on met facilement une petite laine).

Vers 9h30, Nestor vient me chercher en moto, nous allons passer la journée chez lui, avec Agnès, sa femme et Épiphane, leur enfant de 2 ans.
La moto roule à petite allure, la roue arrière voilée nous secoue tranquillement. Beaucoup roulent lentement pour économiser le carburant. Mais nous sommes doublés aussi avec un coup de klaxon systématique (ou deux). C'est le code ici, celui qui double prévient qu'il va doubler, ou peut-être veut dire qu'il faut le laisser doubler. Il y a même un conducteur qui voulait doubler à droite avec insistance.
Nestor quitte la nationale vers une piste qui part dans la brousse. Il veut me montrer son champ. Nous roulons un bon moment par des pistes de différents "calibres", avec des bosses  et des creux. J'imagine le bourbier en saison des pluies. Nous croisons beaucoup de chasseurs, bâtons à la mains : ils chassent les lièvres et les rats des champs. Leurs bâtons servent à creuser les terriers.
 

Quelques chasseurs, photo prise de la moto en roulant...

Puis nous arrivons sur des petites maisons regroupées autour d'une cour. On entre dans la cour par une espace de 1,50 m entre deux maisons. C'est ici que vit une famille peule sédentarisée depuis pas mal d'années, et les enfants du propriétaire ont construit juste à côté de la maison du père. Cet homme qui est descendant de nomades peuls à décider de se fixer sur cette terre libre (plusieurs hectares autour de la maison). Il y fait brouter un troupeau d'une cinquantaine de vaches et cultive également. La terre libre pouvait être occupée facilement. J'ai cru comprendre qu'il en est devenu propriétaire tacitement. Ce ne serait plus pareil maintenant.
Cet homme ne parle pas le français mais seulement le peul.
Après l'avoir salué, nous allons vers le champ à pied.

Le petit groupe de maisons de la famille peule à droite de la mosquée construite par le vieux Peul


Nestor peut cultiver sans loyer. Sa famille connaissait ces peuls depuis longtemps. J'ai été touché par la bonté de cet homme : il propose à Nestor une parcelle qui a déjà des buttes de construites pour planter des ignames. Quand lui-même aura planté, Nestor pourra venir utiliser les buttes qui resteront libres.
 

Champ de buttes pour les ignames


La brousse est parsemée d'arbres mais il en faudrait plus. Il y a des campagnes de reboisement organisées. La culture bio en agroforesterie est connue mais Nestor sait que cela demande plus de main d’œuvre. Je pensais que pour un pays qui a plein de main d’œuvre inoccupée...

Nous repartons vers la maison de Nestor.
Agnès commençait à être inquiète ! Nestor n'avait pas dit ce qu'il comptait faire avec moi.
Je retrouve cette petite maison tournée vers des champs, au calme mais proche de la nationale.

Agnès s'est lancée dans un petit commerce comme beaucoup de femmes. La vie est très difficile. Mais il y a des vendeuses un peu partout. Pas besoin de faire des km pour les courses ordinaires ! Nestor a fabriqué un moulin pour écraser les tomates pour la sauce ou le soja pour faire le fromage. Mais les clients ne sont pas nombreux. Vidéo du moulin
 

Nestor, Épiphane et Agnès
Foufou et lapin sauté sauce choux et carottes...


Nestor est soudeur, il n'y a pas de travail. Alors, il a commencé un élevage de lapins dans une pièce de son atelier. Nous sommes allés les voir en soirée, la nuit était tombée.
 

J'ai été reçu avec un repas de fête qui me touche en regard de leur pauvreté. J'ai eu envie de payer une roue arrière pour la moto, cela évitera de changer trop souvent le pneu et les mâchoires de frein.

Retour 21h00.

 

 

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T
Gilles, le récit de ton dimanche me souffle curieusement un grand vent frais (je vais mettre une petite laine 😉). Il ne cesse de balancer entre dureté de l’existence et humanité de l’homme, entre pauvreté du quotidien et sérénité, presque insouciance salvatrice dans le lendemain. Il me donne l’impression que les togolais accueillent vraiment les vicissitudes de la vie comme elles arrivent pour faire avec – et en ne gardant que le meilleur. Je reste ébahi devant cette attitude d’une grande sagesse…<br /> Gilles, merci pour ce voyage au cœur de l’essentiel !
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G
Oui Thibault, c'est ce qui me touche, cette aptitude à lutter dans une fragilité permanente !